Journaux anciens.
samedi 19 janvier 2008
par Gilbert Giraud

  Journaux anciens . 

    

Lorsque nous étudions le journal de l’école (pré-lecture, affichage) avec des classes du cycle 3, nous présentons aux élèves une exposition de vieux journaux. Les gosses regardent bien sûr d’abord l’aspect du quotidien, le nombre de pages, le format, la couleur (ou plutôt le manque de couleur) et petit à petit nous arrivons à observer les éléments particuliers : la date, le prix, le titre et le sous-titre.

Les prix : suivant les époques, le prix a changé à cause évidemment de la hausse normale et de l’inflation mais parfois l’explication est plus difficile à trouver. Exemple : le même journal d’une année sur l’autre passe de 5 francs à 5 centimes, quelle en est la raison ? Pour des gosses de cours moyen il y a matière à réfléchir...

 

    

  Couverture du journal LIBERTE VAROISE paru le 04/06/1949 Couverture du journal RENOUVEAU numéro 826 paru le 31/07/1960 

 Couverture LE REPUBLICAIN Couverture LE REPUBLICAIN Couverture du journal LE COMBAT PROLETARIEN numéro 20 paru le 01/12/1951 Couverture du journal LA REPLIQUE numéro 76 paru le 24/06/1939

 Couverture du journal COMBAT REPUBLICAIN numéro 171 paru le 18/11/1958 Couverture du journal LE COMBATTANT numéro 90 paru le 01/06/1960 Couverture du journal LE COMBATTANT paru le 01/01/1936

Au début du XXème siècle les journaux ont une grande importance car ils sont le seul support de l’information sur l’actualité. Le journal "l’Aurore" au moment de la parution de la une J’accuse est un quotidien parisien et national.

J’accuse est le titre d’un article rédigé par Émile Zola lors de l’affaire Dreyfus et publié dans le journal L’Aurore du 13 janvier 1898 sous forme d’une lettre ouverte au Président de la République Félix Faure. Il s’est inspiré d’un dossier écrit en 1896 par l’écrivain Bernard Lazare.

L'article dans L'Aurore
L’article dans L’Aurore

J’accuse paraît deux jours après l’acquittement d’Esterhazy par le conseil de guerre (11 janvier), qui semble ruiner tous les espoirs nourris par les partisans d’une révision du procès condamnant Dreyfus. Zola y attaque nommément les généraux et autres officiers responsables de l’erreur judiciaire ayant entraîné le procès et la condamnation, les experts en écritures coupables de « rapports mensongers et frauduleux. » Il met aussi en cause les bureaux de l’armée coupables d’une campagne de presse mensongère, ainsi que les deux conseils de guerre dont l’un a condamné Dreyfus sur la foi d’une pièce restée secrète, tandis que le second acquittait sciemment un coupable. Surtout, il proclame dès le début l’innocence de Dreyfus :

« Mon devoir est de parler, je ne veux pas être complice. Mes nuits seraient hantées par le spectre de l’innocent qui expie là-bas, dans la plus affreuse des tortures, un crime qu’il n’a pas commis. »

Le grand intérêt de l’article de Zola est d’offrir un résumé consolidé des différents éléments constituant les quatre premières années de l’affaire Dreyfus. Même si Zola, et ceux qui l’ont alimenté en informations, ont commis plusieurs erreurs dans la relation, par exemple, en limitant la responsabilité du ministre de la Guerre de l’époque, le général Auguste Mercier.

L’article fait toute la une du quotidien, dont les 300 000 exemplaires tirés s’arrachent en quelques heures. L’émotion est forte, entraînant un sursaut de l’opinion. De nombreux intellectuels signent une pétition en faveur de la révision du procès, publiée elle aussi par L’Aurore. Parmi eux, Anatole France, Georges Courteline, Octave Mirbeau ou Claude Monet, les signatures ayant été recueillies par des étudiants ou de jeunes écrivains comme Marcel Proust. Zola reçoit de nombreux messages de soutien, mais aussi des lettres d’injures et de menaces à coloration antisémite ou xénophobe (le père de Zola était un grand ingenieur de travaux publics italien). La véritable affaire Dreyfus, celle qui passionne les foules pendant plusieurs années, vient de commencer.

En conclusion de son article, Zola espérait un procès devant les Assises afin de faire éclater la vérité. Il est en effet jugé à plusieurs reprises, le résultat final étant d’une part une condamnation à un an de prison et 3 000 francs d’amende pour ses attaques contre l’état-major (soit, avec les frais, 7 525 francs, qu’Octave Mirbeau paie de sa poche le 8 août 1898), de l’autre une condamnation à un mois de prison et 1 000 francs d’amende pour sa dénonciation des trois pseudo-experts, dont chacun doit recevoir 10 000 francs de dommages et intérêts (c’est encore Octave Mirbeau qui obtiendra de Joseph Reinach les 40 000 francs permettant d’éviter la saisie des meubles de Zola). Pour échapper à la prison, Zola s’exile en Angleterre, où il passe onze mois dans l’attente d’une révision du procès Dreyfus. L’arrêt de révision renvoyant Dreyfus devant le conseil de guerre de Rennes est rendu le 3 juin 1899. Zola peut alors rentrer en France, où il publie dans L’Aurore l’article Justice dans lequel il se félicite de cette décision. Mais le procès de Rennes est décevant pour les dreyfusards, et Zola continue à lutter jusqu’à sa mort pour demander la réhabilitation d’Alfred Dreyfus. L’article du 13 janvier doit son titre, donné par Georges Clemenceau, au fait que dans sa conclusion, toutes les phrases commencent par l’expression J’accuse, répétition trouvée par Bernard Lazare :

  • « J’accuse le lieutenant-colonel du Paty de Clam d’avoir été l’ouvrier diabolique de l’erreur judiciaire, en inconscient, je veux le croire, et d’avoir ensuite défendu son œuvre néfaste, depuis trois ans, par les machinations les plus saugrenues et les plus coupables. »
  • « J’accuse le général Mercier de s’être rendu complice, tout au moins par faiblesse d’esprit, d’une des plus grandes iniquités du siècle. »
  • « J’accuse le général Billot d’avoir eu entre les mains les preuves certaines de l’innocence de Dreyfus et de les avoir étouffées, de s’être rendu coupable de ce crime de lèse-humanité et de lèse-justice, dans un but politique et pour sauver l’état-major compromis. »
  • « J’accuse le Général de Boisdeffre et le général Gonse de s’être rendus complices du même crime, l’un sans doute par passion cléricale, l’autre peut-être par cet esprit de corps qui fait des bureaux de la guerre l’arche sainte, inattaquable. »
  • « J’accuse le général de Pellieux et le commandant Ravary d’avoir fait une enquête scélérate, j’entends par là une enquête de la plus monstrueuse partialité, dont nous avons, dans le rapport du second, un impérissable monument de naïve audace. »
  • « J’accuse les trois experts en écritures, les sieurs Belhomme, Varinard et Couard, d’avoir fait des rapports mensongers et frauduleux, à moins qu’un examen médical ne les déclare atteints d’une maladie de la vue et du jugement. »
  • « J’accuse les bureaux de la guerre d’avoir mené dans la presse, particulièrement dans L’Éclair et dans L’Écho de Paris, une campagne abominable, pour égarer l’opinion et couvrir leur faute. »
  • « J’accuse enfin le premier conseil de guerre d’avoir violé le droit, en condamnant un accusé sur une pièce restée secrète, et j’accuse le second conseil de guerre d’avoir couvert cette illégalité, par ordre, en commettant à son tour le crime juridique d’acquitter sciemment un coupable. »
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